30 septembre, 2011

quote quote quote quodète

 pouet, pouet, achtung





juste la tête étouffée dans le dehors et l'écart pynchonien (et essayez ce genre d'adjectif, c'est une ivresse linguistique facile -), la faille du normal, le brouillage du réel, le désert innomé ; comme une dérive vagabonde, une noyade réformée
 



Et cela continuait. Oedipa, en voyeuse, écoutait. Elle rencontra ensuite un soudeur qui avait la gueule toute de travers et qui semblait très content d’être aussi laid ; un gosse qui errait dans la nuit en regrettant la mort d’avant la naissance, comme certains paumés regrettent la douce berceuse vide d’une communauté ; une négresse avec dans le gras enfantin de la joue la marbrure compliquée d’une cicatrice ; elle allait de fausse couche en gausse couche pour des raisons différentes à chaque fois, avec la même délibération que d’autres apportent aux rites de la naissances, consacrée non pas à la continuité mais plutôt à une sorte d’interrègne ; un veilleur de nuit vieillissant en train de mâchonner une barre de savon Ivory Soap : il avait un estomac virtuose qu’il avait habitué à accepter également les lotions, l’Air-Wick solide, le tissu, le tabac et la cire, dans l’intention désespérée d’assimiler tout cela, promesses, productivités, trahisons, ulcères, avant qu’il ne soit trop tard ; et même un voyeur, planté à la poursuite de Dieu sait quelle image. Et comme décor pour tous ces égarements, en décalcomanies, en gribouillages vagues, il y avait toujours le fameux cor de chasse. Elle en vint à tellement le guetter que peut-être ne le vit-elle pas autant que, plus tard, elle le crut. Deux ou trois fois, ç’aurait été assez. Ou trop.






 Extrait tiré de Vente à la criée du lot quarante-neuf, Thomas Pynchon, p142 (édition poche points)

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